Avant toute chose, définissons deux termes essentiels du sujet : quête et extraordinaire.
Ce dernier terme est très imagé mais également très vaste tant les réalités auxquelles il se réfère sont nombreuses et variées. Étymologiquement, extra signifie tout ce qui est en dehors et ordinaire ce qui est commun. Nous obtenons ainsi « extraordinarius », tout ce qui ne se situe pas dans l’ordre ou l’habituel. Ce que les mathématiques traduisent par ∉, signifiant n’appartenant pas à cet ensemble. Et c’est bien cette idée d’être en dehors de l’ensemble admis par tous qui est le moteur de nombreuses quêtes. Mais je reviendrai sur les raisons de cette pulsion par la suite.
Définissons donc maintenant ce terme de quête. Ici, il renvoie à son aspect mythologique et symbolique : quête du graal, quête de l’Atlantis, etc. Ce terme souligne ainsi une dimension de recherche presque sans fin pour son instigateur. Néanmoins, malgré l’apparente complexité, voir l’impossibilité d’aboutir au résultat escompté, la quête joue le rôle de catalyseur des groupes, de motivation, afin de l’achever. De tout temps, de multiples quêtes ont été initiées. Et encore aujourd’hui celles-ci animent nos ambitions pour le futur. D’une certaine manière, nous pouvons dire qu’elles donnent un sens, un but à ceux qui empruntent leur chemin.
En effet, l’être humain est composé de cellules et celles-ci sont extensives par nature. Elles se reproduisent et occupent ainsi tous l’espace de l’environnement qui est à sa disposition. Toutefois, celui-ci génère par définition une limite à la soif d’extension des cellules. Afin de pérenniser, elles doivent donc adopter une nouvelle posture et sortir de ce milieu. C’est ainsi que toutes les espèces vivantes se retrouvent à explorer des espaces en dehors de leur zone de confort. C’est grâce à cela que le poisson sortit de l’eau pour devenir amphibien. Et encore plus proche de nous, que les primates sortirent de la jungle pour évoluer peu à peu en êtres humains. Il est donc naturel de penser selon cette dynamique que notre espèce n’est sans doute pas une finalité, et que notre quête de l’extraordinaire pourra conduire à de nouvelles évolutions.
D’autre part, intéressons-nous maintenant à la composition du raisonnement humain. Le cerveau est divisé en deux hémisphère : le gauche correspond à notre côté rationnel, la réflexion logique et la prise de décision de façon méthodique. À l’inverse l’hémisphère droit est également appelé cerveau reptilien car il fait appel à notre instinct animal. L’intuition, la créativité, les émotions notamment sont régies par cette partie de notre tête. Ainsi, pour se rapprocher de la définition étymologique citée plus haut, il est logique de penser que la caractéristique extraordinaire dans le sens sortir de l’ordre et du commun s’affilie à notre hémisphère droit. Il faut savoir que même si l’être humain utilise ces deux hémisphères, les individus en ont un dominant, dans la majorité des cas. De ce fait, une personne ayant un hémisphère droit qui s’exprime fortement, aura une appétence pour l’extraordinaire et donc une propension à réaliser des actes qualifiés comme tels beaucoup plus forte. La dénomination de neuro-droitiers, entre autres, regroupe ces individus, dont nombre de grands créateurs en sont l’exemple.
En outre, pour reprendre le proverbe « l’herbe est toujours plus verte ailleurs », la quête de l’extraordinaire peut également s’expliquer par d’autres sentiments humains. Dans ce cas il s’agit de la satisfaction et du désir. Ainsi ce que nous qualifions d’éternel insatisfait s’apparente aux formes d’amour que Platon décrit dans Le Banquet. En effet, selon le philosophe, le sentiment d’amour est généré par le désir de ce qui nous manque. De ce fait, si l’équation désir = manque n’est plus vraie, nous obtenons ainsi par analogie une fin du sentiment d’amour. C’est pourquoi, dans le cas des éternels insatisfaits, pour maintenir ce désir actif, il leur faut perpétuellement chercher ce qui leur manque. L’extraordinaire étant par définition quelque chose de difficile à obtenir, sans réelle finalité puisque l’extraordinaire peut se manifester de plusieurs formes, ces individus sont donc bel et bien dans une quête.
Ainsi, la nature biologique humaine semble être un point de convergence de nombreux facteurs expliquant cette quête de notre espèce pour l’extraordinaire. Cela n’est pas exhaustif et des éléments plus culturels auraient également pu être abordés. Néanmoins, nous pouvons nous accorder à dire que cette recherche est stimulante pour les individus qui l’opèrent, et est la source de nombreuses expériences, émotions et découvertes. Ce qui caractérise bien notre espèce. C’est pourquoi, je pense que même si elle peut rester vaine, cette quête doit être maintenue pour conserver notre humanité.